Les 10 jours manquants de la Nouvelle-France – 104 histoires de Nouvelle-France - La radio Internet de la Nouvelle-France

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Les 10 jours manquants de la Nouvelle-France

Pendant 170 ans, toutes les personnes qui traversaient la frontière entre la Nouvelle-France et la Nouvelle-Angleterre avançaient ou reculaient de 10 jours. 

Non… ce n’est malheureusement pas parce qu’ils avaient inventé une machine à voyager dans le temps. 

C’est seulement parce qu’en Nouvelle-Angleterre et en Nouvelle-France, on ne suivait pas le même calendrier. 

En Nouvelle-Angleterre, on suivait le calendrier julien. Et en Nouvelle-France, on suivait le calendrier grégorien. Et les 2 avaient 10 jours de différence. 

Par exemple, quand c’était le 1er mars en Nouvelle-Angleterre, on était déjà près de la mi-mars en Nouvelle-France. 

C’est étrange, mais c’est vrai.

Jusqu’en 1582, la France et l’Angleterre, utilisaient tous les deux le calendrier julien. 

Son nom vient de Jules César [salut Jules] qui l’avait institué il y a plus de 2000 ans pour corriger des erreurs qui l’agaçaient dans l’ancien calendrier romain.

Juste pour vous donner un exemple : chez les Romains, l’année comptait 355 jours tous les 2 ans et 377 ou 378 jours les autres années… 

Oui, je sais : c’était compliqué.

Jules César trouvait ça aussi et il voulait un calendrier plus stable et plus simple.

Mais son calendrier avait un défaut : il était basé sur le soleil, mais il prenait chaque année 11 minutes de retard.

Oui, je sais : ça ne paraît pas beaucoup comme ça, à première vue, 11 minutes par année… Mais à long terme, c’est autre chose. 

Imaginez : si on avait gardé le calendrier julien jusqu’à aujourd’hui, on aurait plus de 2 semaines de retard… 

Ce qui veut dire que le solstice d’été, par exemple, arriverait au début du mois de juin au lieu du 21 juin… Même chose pour le solstice d’hiver qui serait au début du mois de décembre au lieu du 21 décembre.

Quoi qu’il en soit, dans la dernière moitié du XVIe siècle, le calendrier avait déjà pris 10 jours de retard et beaucoup de gens l’avaient remarqué. 

Mais que ce soit pour pour des raisons politiques ou économiques, personne ne voulait s’aventurer à proposer de solution. 

C’est là qu’est intervenu le pape Grégoire XIII.

Pour régler le problème des 11 minutes de retard par année, il a proposé en 1582 un calendrier amélioré qui commencerait dès l’année suivante. 

Mais avant de l’appliquer, on devait couper 10 jours dans l’année 1582 pour rattraper le temps perdu.

Oui… mais lesquels?

À cause du fait que ça prendrait beaucoup de temps pour avertir tout le monde, on n’avait pas le choix d’envisager de couper vers au mois d’octobre. On a donc décidé que le 4 octobre de cette année-là ne serait pas suivi du 5 octobre, mais du 15 octobre… 

Ça ne faisait pas plaisir à tout le monde. Et ça a causé de gros maux de tête…Par exemple: les calendriers devaient être réimprimés… Qui allait payer pour ça? Est-ce qu’on devait payer un loyer complet pour un mois qui comptait seulement 21 jours? 

C’était la confusion.

D’autant plus qu’au début, il n’y avait qu’une poignée de pays qui se sont convertis au nouveau calendrier.

Certains pays, surtout des pays avec une population protestante, refusaient, quant à eux, d’adopter le calendrier grégorien. Pas parce qu’ils ne croyaient pas que leur calendrier prenait du retard par rapport au soleil (ça, ils le savaient), mais parce qu’ils ne voulaient pas donner raison au pape, le chef des catholiques.

C’est pourquoi en Nouvelle-France, on avait 10 jours d’avance par rapport à la Nouvelle-Angleterre. Parce que les 2 colonies ne suivaient plus le même calendrier.

Cela étant dit, la réforme du calendrier était inévitable. Au fil des années, il devenait de plus en plus difficile de rédiger des contrats ou des traités entre les pays parce qu’on devait toujours spécifier sur quel calendrier on se basait. 

C’était le cas pour l’Angleterre. Mais en 1752, après 170 ans de résistance, influencée par la Suisse, les Pays-Bas et  l’Allemagne, l’Angleterre a finalement adopté le calendrier grégorien. Mais cette fois-ci, il lui a fallu enlever 11 jours à son ancien calendrier, parce qu’il avait encore pris du retard…

Et voilà! Vous savez maintenant pourquoi entre 1582 et 1752, on peut dire sans se tromper qu’à chaque fois qu’on traversait la frontière entre la Nouvelle-France et la Nouvelle-Angleterre, on faisait un bon de 10 jours dans le temps.

NNF

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